Reve vie spirituelle

Le rêve et la vie spirituelle

Une soirée a rassemblé des représentants de diverses religions à l’Arzillier sur ce thème original : le rêve et la vie spirituelle. Ils étaient invités à l’explorer par diverses approches : le rêve dans nos écrits fondateurs et traditions, quelques « rêveurs ». 

 

Le sens du rêve dans la vie spirituelle dans ma tradition. Mes propres rêves: quel sens est-ce que je leur donne. Comment est-ce que je les intègre ? J’y ai apporté une contribution chrétienne.

La psychologie a beaucoup étudié le rêve. Mais en occident on a une approche plutôt négative du rêve. Il est associé à l’illusion. La dimension religieuse du rêve n’est en général pas abordée dans les livres de spiritualité. Pourtant pour les anciens, le rêve était un des lieux où Dieu parle. Aujourd’hui on estime que les rêves viennent uniquement du subconscient. Dans notre société sécularisée, Dieu a été relégué dans les marges, par conséquent on ne fait plus le lien entre le rêve et la vie spirituelle.

Dans son livre Anselm Grün plaide pour une « spiritualité globale qui n’exclut pas le corps et ne néglige pas le rêve »… « La recherche psychologique nous est utile pour comprendre le langage des rêves. Cependant pour nous ce langage n’est pas seulement celui de notre âme, de notre inconscient, mais la langue oubliée de Dieu ». (« Les rêves et la vie spirituelle », p. 62, 65). C’est de cette autre langue que les religions sont témoins et que nous avons un découvert durant cette soirée

Le rêve dans la Bible. Quelques « rêveurs ». 

Dans la Bible il y a de grands rêveurs : Jacob qui rêve d’une échelle lancée vers le ciel, où montent et descendent des anges. Ce rêve lui donne du courage alors qu’il est dans une situation difficile. Il montre que Dieu est avec lui et le bénit. Alors qu’il fuit son frère Esaü qui veut le tuer, son rêve lui fait prendre conscience de la véritable réalité : Dieu l’accompagne.

Le rêve de Joseph (les gerbes de blé qui représentent ses frères s’inclinant devant sa gerbe de blé) lui font prendre conscience de sa vocation, mais l’isole aussi de ses frères. Le rêve l’aide à agir avec justesse, il le rend sage. Il le confronte à la vérité de sa vie. Les israélites étaient convaincus que Dieu parle dans le rêve. Le livre des Nombres dit : « S’il y a parmi vous un prophète du Seigneur, Dieu se fait connaître à lui en vision ; il lui parle en rêve ».

Dans le Nouveau Testament, un grand rêveur est Joseph, qui apprend dans un rêve le mystère de Marie, son épouse et de l’enfant qu’elle porte en elle. Cela le met en route, le pousse à agir, à obéir. Tout comme les mages, qui ont visité Jésus à Bethléem, obéissent à un rêve qui les appelle à ne pas retourner vers le roi Hérode.

Pilate, le gouverneur romain qui a décidé de crucifier Jésus, n’écoute pas le rêve que sa femme a fait au sujet de Jésus, qu’elle voyait comme innocent. Parfois le rêve révèle la nature réelle d’un être. Voici une fonction du rêve dans la Bible : il dévoile la vérité me concernant et concernant d’autres personnes. Il corrige et complète notre appréciation consciente mais ouvre aussi de nouveaux horizons.

 Pour Tertullien : « Tous les hommes ne savent-ils pas que Dieu se révèle le mieux par le rêve ». Les rêves apparaissent en particulier dans les actes des martyrs. Trois jours avant sa mort, Polycarpe rêve que son oreiller est en flamme. Il y voit une annonce de sa mort sur le bucher. Cela lui donne la force de supporter le martyre. Une autre fonction du rêve est d’encourager. 

Pour Evagre, les mauvais rêves sont le signe que les passions et les émotions nous influencent. L’état de paix intérieure se signale par « l’absence de passions et d’émotions désordonnées dans les rêves ». Il appelle à ne pas nous endormir en colère. Pour lui les rêves négatifs doivent nous stimuler à nous tourner vers Dieu pour qu’il guérisse notre âme malade et nous donne la paix. Dans ces mauvais rêves, nous nous confrontons à notre ombre, qu’il faut affronter en appelant Dieu au secours. Pour lui, l’attention au rêve est intégrée dans un chemin de purification et de guérison de nos pensées qui comporte le retour sur soi-même, silence, prière, jeûne, lutte contre les vices. Le but de ce chemin est de prier sans être distrait, à devenir paisible en Dieu et rempli d’amour.

Le sens du rêve dans la vie spirituelle

La Tradition spirituelle chrétienne a mis le rêve en lien avec d’autres outils spirituels : jeûne, prière, méditation, vivre dans la miséricorde, cherche la réconciliation, lecture des Ecrits sacrés. Elle n’isole pas le rêve des autres itinéraires spirituels. Elle met l’accent avant tout sur le fait que c’est dans la Parole communiquée à travers la Bible que Dieu nous rencontre. Elle signale aussi qu’il y a le danger de l’introspection et de la fascination du monde intérieur quand on s’isole. Il est nécessaire de partager nos rêves dans un accompagnement spirituel.

Mes propres rêves: quel sens est-ce que je leur donne. Comment est-ce que je les intègre ?

J’ai fait quelques grands rêves, qui m’ont encouragé. C’était surtout dans des moments difficiles de ma vie. Des rêves qui m’ont encouragé et élargi et que j’ai reçu comme étant un cadeau d’en Haut.

Certains rêves m’ont aussi éclairé sur une situation que je vivais, par exemple de ne pas être reconnu ou d’être ignoré dans mon travail. Ainsi il y a quelques années j’ai rêvé de deux gros chiens noirs dans une ferme isolée au sommet d’une colline me manifestent beaucoup d’affection en me léchant et me renversant. Je les caresse. Mais les propriétaires de la ferme se désintéressent complètement de moi. La reconnaissance est venue d’autres personnes (des chiens !), pas de celles dont je m’attendais à ce qu’elles manifestent un signe.

Anselm Grün donne quelques indications pour une approche spirituelle des rêves. Je m’y retrouve assez bien :

  1. Noter le rêve.
  2. Prier Dieu, le soir, de nous envoyer de bons rêves. Le sens de la prière du soir est de nous abandonner entre les mains de Dieu
  3. Prendre ses rêves au sérieux et dialoguer avec eux. Ce dialogue peut se transformer en prière. Certains rêves ont nourri ma prière. D’autres, je les ai transformés en prédication (sans dire que j’ai rêvé). Je pense que certaines de mes meilleures prédications ont été élaborées à partir d’un rêve.
  4. Parler de mon rêve à quelqu’un, dans un accompagnement spirituel. Parfois certaines décisions ne se prennent pas de manière purement rationnelle et par la seule prière : le rêve peut alors aider, sans pour autant indiquer clairement la solution. Pour moi ils ne sont pas la norme suprême. Ils doivent toujours être confronté avec la Parole de Dieu que je rencontre dans l’Ecriture.
  5. « Il ne faut pas s’arrêter au rêve, mais le prolonger par la Parole de Dieu » (A. Grün). C’est ainsi que des symboles dans un rêve me conduisent à creuser ces mêmes symboles dans les Ecritures. Le rêve enrichit ainsi ma lecture des Ecritures.

 


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