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Les Eglises peuvent-elles se transformer ?

Le thème de la transformation est central dans le mouvement œcuménique.1 Paul annonce dans sa deuxième aux Corinthiens la promesse ultime : « Tous, nous serons transformés…par la victoire de notre Seigneur Jésus-Christ » (15,51-58).

 Si l’apôtre parle ici de notre transformation personnelle (progressive dans le temps présente et immédiate au dernier jour), ont peut aussi souligner l’importance de ce thème non seulement pour notre progrès personnel, mais aussi pour celui de l’unité entre les églises.

La prière et témoignage communs transforment la perception que nous avons des autres églises. C’est l’expérience que nous faisons dans la cathédrale de Lausanne : chaque premier dimanche du mois, une célébration de la Parole réunit les vingt églises de la Communauté des Eglises chrétiennes dans le canton de Vaud et bien d’autres communautés encore, en particulier celles de la migration. A l’écoute de la même Parole, visités par le même Seigneur vers lequel nous nous tournons ensemble avec une incroyable diversité, nous apprenons à nous appartenir les uns aux autres. Et nous découvrons que ce qui nous unit est tellement plus fort que ce qui nous sépare.

Nous savons aussi que la Parole de Dieu crée un lien entre communautés. Plus nous la vivons, plus nous serons unis. L’unité parfaite adviendra lorsque tous feront la volonté du Christ… Mais, évidemment, cela ne sera qu’au dernier jour. Toutefois, nous pouvons l’anticiper en priant « que ton règne vienne, que ta volonté soit faite ». Prier et, bien sûr, vivre en cohérence avec notre prière.

 

La fraternité retrouvée.

Dans son livre sur le Notre Père (Vous donc priez ainsi, Bayard, Paris, 2011), le Groupe des Dombes, propose un itinéraire de conversion à partir de cette prière : « la proclamation d’une même paternité oblige les chrétiens à prendre conscience des exigences fraternelles qu’elle implique », écrit ce célèbre groupe de dialogue entre protestants et catholiques.

Une fraternité retrouvée, voici le grand acquis du pèlerinage œcuménique du siècle dernier. C’est ce que notait déjà Jean-Paul II, il y a plus de 25 ans dans son encyclique sur l’unité (Ut unum sint). Mais l’unité pour laquelle nous prions va au-delà de bonnes relations. Si Jésus a prié pour que « tous soient un…afin que le monde croie », cette unité n’est pas uniquement spirituelle, elle est « visible ». Pour que le monde croie, il doit voir. Voir quoi ? Des chrétiens unis dans la fraternité et un témoignage commun, célébrant le salut autour d’une même table avec des ministères qui se reconnaissent mutuellement. Cette communion sans restrictions au même pain et vin eucharistiques reste le but du mouvement œcuménique.

Reconnaissons que nous en sommes encore loin. Mais nous sommes en route. Qui pourra ultimement faire obstacle à ce but ? Mais cela demande de notre part la volonté de renoncer à nous concurrencer, de nous ouvrir à d’autres manière de vivre et célébrer la foi, d’avoir besoin des autres églises Voire même de changer certaines doctrines ou pratiques, afin d’être l’Eglise une pour laquelle Jésus a prié. Voulons-nous cette transformation ?

 

Des fruits de transformation

Oui, nous sommes en route. L’arbre de la pleine unité grandit, et on peut y goûter déjà de nombreux fruits de la transformation, que l’Esprit saint a produit. Il y a bientôt 40 ans le document de Lima « Baptême, Eucharistie, Ministère » (BEM) a été publié. Ce texte reste le document le plus important du mouvement œcuménique : plus de 150 églises y ont répondu, dont 51 églises réformées. Il a contribué à des accords et des rapprochements, comme par exemple entre anglicans, luthériens et réformés avec les accords de Porvoo et de Reuilly, qui ont permis l’intercommunion. Ce qui semblait autrefois impossible !

Tant d’autres fruits de transformation – ou de « conversion des églises », selon la formule du Groupe des Dombes – peuvent être cueillis. J’en mentionnerai juste deux D’abord un signe témoignant d’un bel élargissement de l’œcuménisme : la semaine de prière pour l’unité des chrétiens a pris ce thème de la transformation et ce verset de la lettre aux Corinthiens. Or ce thpme a été repris par le livret de la Semaine de prière de l’Alliance évangélique européenne en 2012. Cette semaine date du milieu du 19e siècle et précède de dix jours la Semaine de prière pour l’unité. Evangéliques et oecuméniques tirent-ils à la même corde !

Le Vatican et la Fédération luthérienne mondiale ont fêté ensemble le 500e anniversaire de la Réforme, qui a été en 2017. Les protestants ont renoncé à instrumentaliser cet événement contre les catholiques. Et les catholiques ont reconnu que la Réforme a permis « une impulsion à un retour à la Parole de Dieu et à la place centrale de l’Ecriture sainte dans la vie de l’Eglise », selon le cardinal K. Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens. Quelle transformation dans les relations entre les Eglises !

1 C’était le thème de la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens en 2012, ainsi que la Semaine de prière de l’Alliance évangélique universelle. La Conférence missionnaire du COE à Arusha en 2018 en fait aussi son thème.


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